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"La différence entre l'érotisme et la pornographie c'est la lumière". Bruce LaBruce
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jeudi 24 février 2011



LA BRAGUETTE




La renaissance: l'age d'or de la braguette.



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Au milieu du XVe siècle, alors que la guerre de Cent Ans est un souvenir, la robe n’est plus guère portée que par les hommes de justice et d’Eglise (comme aujourd’hui), et les seniors. Les chausses moulent jusqu’au haut des cuisses tandis que le pourpoint raccourcit. Tellement qu’en 1467, le chroniqueur Mathieu de Coucy s’indigne de ces «hommes vestus plus court qu’ils n’eurent oncques fait. Tellement que l’on voit la façon de leurs culs et de leurs génitoires». Pour la bienséance, ces dernières sont bientôt couvertes d’une poche amovible en forme de triangle : la braye, cousine étymologique des braies, ancêtre de la brayette ou… braguette. L’italien se souvient de cette origine : elle se dit brachetta, du bas latin braca, poche. Cet artefact est-il emprunté au monde paysan ou aux coquilles en métal ou cuir qui protégeaient les hommes d’armes ? Toujours est-il que cette poche s’exhibera de façon triomphale à l’entrejambe du haut-de-chausses, cette vaste culotte très mode au XVIe siècle. La Renaissance sera l’âge d’or de la braguette.

Extrait de l'article de Corinne Bensimon: "Braguettes, l’empire du mâle" pour Libération.fr





Jakob Seisenegger. L’empereur Charles Quint avec un molosse, 1532







Vittore Carpaccio. Jeune cavalier dans un paysage, 1510







George Pencz. Portrait d'un jeune homme assis, 1544







Pieter Brueghel Le Vieux. Le pays de cocagne, 1567







Giuseppe Arcimboldo. L'empereur Maximilien II de Habsbourg (1527-1596), sa femme Marie, ses trois enfants Anne, Rodolphe et Ernest, vers 1563







Giovanni Battista Moroni. Portrait d'un tailleur, 1565-68







Giovanni Battista Moroni. Portrait d' Antonio Navagero, 1565







Pieter Brueghel I, le Vieux - L'Eté. 1568







Agnolo Bronzino - portrait de guidobaldo II della rovere, 1531-1532







A lire sur le sujet: "Braguettes : une histoire du vêtement et des moeurs." Colette Gouvion et Khadiga Aglan. Editions Rouergue.









Extrait du livre (première page):


Paris, 1467. Indigné, messire Mathieu de Coucy, bon bourgeois et chroniqueur de son époque, regagne son domicile. Tandis qu'il descend la montagne Sainte-Geneviève, fief de la Sorbonne et de ses étudiants, il croise plusieurs passants, et pas seulement des jeunes hommes, qui ne portent plus la robe ou la longue tunique, vêtement de pudeur et de dignité ni même les braies du petit peuple et des paysans. Ils arborent des pourpoints courts surmontant des hauts-de-chausses moulant si étroitement le bas du corps que l'on peut voir, comme il l'écrit d'une plume courroucée : «des hommes vestus plus court qu'ils n'eurent oncques fait. Tellement que l'on voit la façon de leurs culs et de leurs génitoires».

Plume en main, cependant, il réfléchit et s'avise que si son courroux a toute raison d'être, il n'a pas lieu d'être surpris de l'entorse à la vertu qu'il vient de constater. Les sociétés passent par heurs et malheurs. À chaque fois qu'elles entrent dans une ère de paix, les moeurs se relâchent, accompagnées par un grand appétit de jouissance. La lecture des chroniques de ses prédécesseurs lui a appris, par exemple, qu'au siècle précédent, sous Charles VI - qui n'a pas encore vingt ans- durant une accalmie de la guerre de Cent Ans, la cour du roi menait joyeuse vie, s'ébaudissant le soir en bals costumés où les hommes portaient des robes «déguisées».

Pendant ce temps, les bourgeois s'enrichissaient et Paris vivait un tel âge d'or commercial et intellectuel qu'elle était surnommée «la Nouvelle Athènes» de l'Occident. Quant aux étudiants, ils s'affranchissaient des vieux dogmes et découvraient avec volupté les écrivains de l'Antiquité, prenaient la nature comme objet d'études et s'exerçaient au plein exercice de la critique objective. À moeurs plus légères, mode plus libre. L'extravagance s'affichait alors au bout des souliers à la poulaine, dont la pointe était si longue qu'elle pouvait, soutenue parfois par des baleines, atteindre plus de 60 cm.

Mais, surtout, l'inconvenance prenait droit de cité avec les chausses. Jusqu'alors, sous la robe, les jambes masculines étaient protégées par des bandes molletières. Mais voilà que cette robe qui engloutissait les formes est remplacée par un long pourpoint, les molletières par des bas, les chausses, montant jusqu'aux cuisses, soulignant la finesse de la jambe : le goût était à la silhouette longiligne. Ces chausses exigeaient de bons artisans : pour qu'elles adhérent parfaitement à la jambe, sans plisser disgracieusement, ces façonniers devaient les tailler clans le biais.






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